Miriam Josi (CH) et Stella Lee Prowse (AU) échangent leurs idées et travaillent ensemble depuis 2012. À cette époque, elles faisaient leurs études en Design de produits à Parsons à New York. Leur curiosité et leur propension à trouver de la beauté dans des endroits inattendus les rapprochent et leur pratique explore la croissance, la décomposition, les déchets et les processus matériels. Elles ont toutes les deux obtenu un Master of Science in Nature Inspired Design à l’ENSCI – Les Ateliers (École nationale supérieure de création industrielle, Paris). Elles ont ensuite fondé Aléa, qui est leur studio commun.
Les recherches que mènent actuellement Aléa explorent un processus unique de myco-fabrication bio-inclusive qui utilise, pour cultiver des créations dans un sol sauvage, le mycélium, le système racinaire des champignons, et des substrats de déchets locaux. L’obtention du prix de la résidence Boisbuchet 2021, leur a permis d’installer leur laboratoire dans la nature afin de tester leurs procédés à taille réelle. Là, elles ont pu planter, cultiver et récolter la première chaise souterraine issue de la myco-fabrication. Ce procédé permet de contourner la stérilisation à forte intensité énergétique et les moules en plastique, et d’examiner le potentiel des capacités régénératrices des mycéliums afin d’assainir les sols in situ et contribuer à nourrir la biodiversité. Leurs recherches actuelles sont soutenues par FAIRE Paris et le Pavillon de l’Arsenal.
Aléa s’efforce d’instaurer une relation plus profonde entre l’environnement naturel et l’environnement bâti, en brouillant les frontières entre les disciplines. Leur mission consiste à adopter une position critique concernant la bio-conception, afin d’éviter une trajectoire d’exploitation et de contrôle de la nature et d’imaginer au contraire de nouvelles façons de faire qui interagissent, s’adaptent et partagent le contrôle et les bénéfices avec un supplément d’humanité.
L’atelier
Souvent invisible à l’œil nu et pourtant omniprésent et tellement essentiel à la vie sur terre, le mycélium est la partie reproductive des champignons. Longtemps négligée par la science et traitée auparavant comme une partie de la botanique, la mycologie (l’étude des champignons) est désormais une branche reconnue de la biologie.
Depuis quelques années, le mycélium est utilisé dans le domaine du design pour aider à la fabrication de nouveaux matériaux bio-circulaires (myco-fabrication). Il s’agit d’un processus que nous cherchons à explorer et à développer.
Dans cet atelier, nous sortirons le mycélium du cadre du laboratoire stérile de myco-fabrication pour le laisser se développer dans son environnement naturel. Cela nous permettra d’exploiter le potentiel de ses capacités régénératrices et de développer des procédés plus adaptés au niveau local et plus inclusifs sur le plan biologique, en partageant le contrôle et les avantages avec l’organisme.
La bio-inclusivité consiste à concevoir la nature comme un partenaire. En prenant comme référence la philosophe environnementale Freya Mathews, nous estimons que la cause principale de la crise écologique est l’incapacité de considérer les humains et la nature comme constituant un tout, et cette distinction binaire a conduit vers des chemins soit d’exploitation (anthropocentrique) soit de romantisation (biocentrique) de la nature. Afin de dépasser ces approches, nous avons l’intention de nous engager sur un pied d’égalité avec la nature, en révélant au bout du compte que nos propres besoins sont étroitement liés à ce qui n’est pas humain.
Les participants s’engageront d’abord dans une interaction physique avec la terre, en commençant par une exploration holistique du territoire de Boisbuchet, grâce à l’identification et à la compréhension du rôle des champignons des sols locaux. Nous réaliserons ensuite des expériences avec du mycélium et des substrats provenant des environs, tout en cherchant à penser « au-delà du moule » afin d’envisager une collaboration avec plus de réciprocité entre les organismes. Après cette semaine immersive d’expérimentation collective dans la nature, de discussions et de cueillette de nourriture, les participants auront la chance de cultiver et de récolter une œuvre collective ou une création personnelle.
"Renouons avec notre nature sauvage et imaginons de nouvelles façons de réparer les environnements perturbés par l’homme."
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Fondé en 1986, le Domaine de Boisbuchet est un centre international de recherche en design et architecture.
Le campus est entouré de 150 hectares de nature protégée dans le sud-ouest de la France et comprend un parc architectural de bâtiments historiques et contemporains. Nos ateliers, expositions et événements ainsi qu’une collection de design et une bibliothèque sont destinés aux clients professionnels et aux visiteurs de la communauté voisine et mondiale.